Mai 2021
Par Gérard GROLLEAU, Ornithologue et Administrateur d’Yvelines Environnement
En Ile-de-France, des personnes s’interrogent régulièrement sur la présence d’oiseaux de taille moyenne et d’une belle couleur verte dans leur jardin, particulièrement en période hivernale. Il s’agit de Perruches à collier, oiseaux exotiques que ces personnes pensent échappés de captivité. Ce n’est plus le cas depuis longtemps ; cette espèce originaire des zones tropicales d’Asie et d’Afrique (il en existe plusieurs sous-espèces difficiles à différencier) s’étant montrée résistante aux conditions climatiques de nos pays européens tempérés, a pu ainsi s’installer et développer des populations de plus en plus florissantes.
Cette perruche a ainsi colonisé le Royaume-Uni, les Pays-Bas, la Belgique, l’Allemagne, l’Italie, la France, l’Espagne, et des individus ont été vus au Maroc. L’origine des premiers individus installés en France, à partir de 1970 semble-t-il, découlerait d’oiseaux échappés accidentellement d’un transport par avion atterrissant à Orly ; ceci dit, l’espèce était déjà bien installée au Royaume-Uni et aux Pays-Bas à cette date et il est probable qu’elle ait contribué, par expansion de son aire, à peupler notre pays.
De quelques individus en 1970, nous sommes passés à environ 10.000 en Ile-de-France selon les estimations de la LPO, ce qui explique la fréquence accrue des observations. Comme tous les psittacidés, leur régime alimentaire est frugivore et granivore, mais la consommation de bourgeons au démarrage printanier des arbres ainsi que de fleurs (cas des robiniers faux-acacias) est régulière. Cet éclectisme alimentaire explique en partie leur adaptation à nos conditions climatiques où la nourriture se fait rare en hiver. C’est là où le nourrissage hivernal des oiseaux intervient pour compenser la raréfaction de la nourriture dans la nature et permettre une survie hivernale optimale engendrant un accroissement rapide de la population. Ces oiseaux savent trouver les mangeoires pour passereaux et accéder à la nourriture grâce à leurs capacités acrobatiques parfois.
L’espèce a été classée « invasive », c’est-à-dire qu’elle n’est pas protégée et de fait sans statut, donc destructible. A juste titre, des questions se posent sur l’impact de ces perruches sur les autres espèces d’oiseaux et certains mammifères. Lorsqu’elles prennent possession des mangeoires, ces perruches sont agressives envers les autres oiseaux ; par ailleurs, ce sont des cavicoles, c’est-à-dire qu’elles nichent dans des trous d’arbres, en chassant les écureuils, les pics, les étourneaux, donc en concurrençant nos espèces indigènes. Cependant, il n’y a pas d’études scientifiques démontrant un impact négatif sur les espèces indigènes, ce qui ne veut pas dire qu’il n’y en a pas.
Comme pour toutes les espèces classées invasives, végétales ou animales, il faudrait pouvoir les éliminer ou, tout du moins, freiner fortement leur expansion. Or, il n’existe pas de moyen de lutte spécifique pour cette perruche et, par ailleurs, il est bien trop tard. Comme pour les jussies (plantes aquatiques), le ragondin, le rat musqué, le raton laveur, le rossignol du Japon, l’ibis sacré, etc…, l’administration chargée de la protection de la nature a montré sa lenteur à décider et son inefficacité. Si l’on n’arrive pas à détruire les perruches, il faudrait au moins arrêter de les nourrir en hiver en leur rendant les mangeoires inaccessibles. Je conçois que cela soit difficile car ce sont de beaux oiseaux, mais il y a un choix à faire. En outre, le commerce de cette espèce (à l’origine en captivité) devrait être interdit depuis longtemps !!! Je ne ferai pas de commentaires sur le commerce des animaux sauvages en général.
Après la reproduction (mars-avril), des groupes se forment, constitués principalement de jeunes, cherchant leur nourriture et le soir se réunissant en dortoirs pouvant regrouper plusieurs centaines d’individus.
A titre d’exemples : une colonie existe depuis longtemps au Parc de Sceaux, une autre dans le Parc de Versailles et ses environs, d’autres non identifiées dans des secteurs favorables. Il est impossible de « rater » ces oiseaux qui se déplacent en criant et, en général, par petits groupes.
Quel avenir est réservé à ces beaux oiseaux indésirables ?