Par Gérard Grolleau
La BERNACHE DU CANADA est la plus grosse des oies sauvages, avec une hauteur de 1m (cou tendu), une envergure de 1,5Om à 1,80m et un poids allant jusqu’à 5 kg (parfois 6 kg).
Cette oie est originaire d’Amérique du nord où elle est migratrice, tandis que les individus introduits en Europe et leurs descendants sont sédentaires, effectuant seulement des petits déplacements en période hivernale.
Elle fut introduite en Europe – en Grande-Bretagne – au 17ème siècle, comme oiseau d’ornement, puis à partir de 1930 en Scandinavie et autres pays de notre continent. Cet oiseau s’est très bien adapté chez nous et s’est reproduit ; des jeunes se sont échappés des milieux aquatiques de leur naissance et ont colonisé d’autres plans d’eau petit à petit.
Nous avons connaissance d’un couple introduit à la Base de loisirs de l’Étang de St-Quentin (Yvelines) au début des années 1970 et il y en a probablement eu d’autres dans des propriétés privées. Ce couple a engendré une population qui a colonisé l’étang puis d’autres plans d’eau voisins.
La population française de cette oie a été estimée à 13500 individus en 2016 par l’ONCFS (maintenant inclus dans l’Office Français de la Biodiversité – OFB) dont près de 50% en Ile-de-France. L’abondance de ce gros oiseau dans notre région a créé, assez rapidement, différents types de problèmes, vu son poids et son régime herbivore, ainsi que les regroupements en bandes après la période de reproduction :
+ dégâts aux cultures, de céréales notamment.
+ dégâts dans les milieux naturels, par écrasement des roselières, destruction de plantes protégées, et agressivité envers les anatidés indigènes, en période de nidification, pour la défense d’un grand territoire.
+ problèmes sanitaires dans les plans d’eau des bases de loisirs, par accumulation des déjections, sans oublier l’eutrophisation des plans d’eau naturels par ces mêmes déjections.
Il s’agit donc d’une espèce exotique envahissante ; la première mesure nationale a été la mise en place « d’un plan de maîtrise des populations en 2012 » par tir et par destruction des œufs. Les faibles résultats obtenus ont conduit à l’ouverture à la chasse de cette espèce en 2018. Les chasseurs peuvent donc les tuer comme gibier mais n’ont pas le droit d’utiliser d’appelants.
Il est par ailleurs interdit de nourrir ces oiseaux car cela contribue à augmenter le taux de survie dans les populations, d’où l’augmentation des effectifs de ces dernières. Des promeneurs, qui trouvent ces oies jolies (ce qui est exact) ont tendance à leur donner de la nourriture, notamment du pain ; une partie du pain tombe au fond de l’eau, dans la vase, et en période de fortes chaleurs avec baisse du niveau des eaux, les oiseaux qui fouillent la vase peuvent être atteints de botulisme, lequel produit chaque année des mortalités massives en diverses régions. Le pain est à proscrire pour tous les oiseaux.
L’homme a encore joué à l’apprenti sorcier en introduisant une espèce exogène pour son agrément ; une Bernache du Canada peut vivre jusqu’à 25 ans à l’état sauvage, donc encore plus longtemps chez les individus sédentarisés, ce qui donne une idée de l’impact que cette espèce peut avoir sur notre environnement. Elle est venue s’ajouter à une longue liste comme l’ambroisie, la jussie chez les végétaux, le ragondin, le rat musqué, le raton laveur, le vison d’Amérique, la perruche à collier, etc… toutes espèces introduites pour l’ornementation et/ou le profit, qui bouleversent nos écosystèmes déjà mis à mal par l’homme lui-même.